As its name suggests, the said “American” neighborhood is nested on a hill, overlooking the river and city, has kept nothing from its exotic and opulent past, except the old memory of an Anglican school. The school was eventually closed, squatted by politico-military people, in this case Syrian in this case, while the neighborhood itself was “invaded by the poor neighboring mountains, where growing apricots, or any kind of fruit tree, was no longer enough to feed their families. ” Welcome to Lebanon, homeland of the novelist Jabbour Douaihy.
We are in Tripoli, the great northern city: At a distance of two mortar fires from Syria, and three bombs from Iraq. The author of “Chase away” (2013) and “June rain” (2010), literary critique at L’Orient Littéraire, and French literature teacher at the University of Tripoli, sets the scene, not at the heart of war, but rather on its edges.
The first characters to enter the scene, Abdel Karim Azzam, is the heir to a melancholic once powerful family of Muslim notables. Son of the family, he falls in love with a Serbian ballerina in Paris, but returns to Tripoli after the departure of his beloved.
In the old family house, shabby and luxurious, deserted by his family, Abdel-Karim listens to opera drinking whiskey and looks after bonsai trees that his dancer left him. Softly opposed to this “end of race” melancholic convinced that “life unfolded where he was not”, is a second character, that of Intissar. A housekeeper at the Azzams (as was her mother before her), Intissar has both feet on the ground. Courageous, attractive, she is the one to put order in Abdel Karim’s house and, by extension, in hi life. Above all, she is the one who links the villa and Azzams, to the American neighborhood – where life is truly played, seems to think the author.
From this disinherited hill, emerges the third character of the novel, one that embodies the (obviously tormented)future of Lebanon. Ismail is Intissar’s last child. We follow him from cradle to battlefields. For war is here, as in many countries of the world, the easiest of temptations. Inflamed by the sermons of a young sheikh “freshly returned from Pakistan”, Ismail will leave everything and run, a madly consenting martyr, in the modern crusade “against the enemies of God and Islam,” which will take hom from Syria to Iraq.
The metamorphosis of an ordinary youth into a merciless militiaman is not a new topic among Lebanese writers. On this theme, The Stone of Laughter, a beautiful novel by Hoda Barakat (1996, Actes Sud), has not, to date, been equated. But Jabbour Douaihy weaves a different kind of patters. Abdel Karim and Ismail, far from ignoring or hating each other, will join and help each other, reviving the invisible threads of an unlikely brotherhood. The American neighborhood with its elegant and concise writing, uses flashback masterfully: it makes of the time that has passed and passes the keystone of this sharp and beautiful novel.
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French original below:
Comme son nom le laisse deviner, le quartier dit « américain », niché sur une colline surplombant le fleuve et la ville, n’a rien gardé de son passé exotique et cossu, sinon le souvenu d’une école anglicane. Qui fut, sitôt fermée, squattée par la gent politico-militaire, syrienne en l’occurrence, tandis que le quartier lui-même était « envahi par les pauvres des montagnes voisines, où la culture des abricotiers, ni d’aucun arbre fruitier, ne suffit plus à nourrir leurs familles ». Bienvenue au Liban, pays natal du romancier Jabbour Douaihy.
Nous sommes à Tripoli, la grande ville du nord : à deux tirs de mortier de la Syrie, à trois jets de bombe de l’Irak. L’auteur de Saint Georges regardait ailleurs (2013) et de Pluie de juin (2010), critique à L’Orient littéraire et professeur de littérature française à l’université de Tripoli, plante le décor, non pas au coeur de la guerre, mais sur ses bords. Le premier personnage à entrer en scène, Abdel-Karim Azzam, est l’héritier mélancolique d’une famille autrefois puissante de notables musulmans. Fils de famille, c’est à Paris qu’il tombe amoureux
d’une ballerine serbe. Mais c’est à Tripoli qu’il revient, après le départ de sa belle. Dans la vieille maison familiale, au luxe défraîchi, désertée par les siens, Abdel-Karim écoute de l’opéra en buvant du whisky et soigne les bonsaïs que lui a laissés sa danseuse. À ce « fin de race » mélancolique, convaincu que « la vie se jouait là où il n’était pas », s’oppose, tout en douceur, une deuxième figure : celle d’Intissâr.
Femme de ménage chez les Azzam (comme le fut, avant elle, sa mère), Intissâr a les pieds sur terre. Courageuse. séduisante, c’est elle qui
remet en ordre la maison et, par ricochet, la vie d’Abdel-Karim. C’est elle, surtout, qui fait le lien entre la villa des Azzam et le Quartier américain — là où la vie se joue, semble penser l’auteur.
De cette colline déshéritée surgit le troisième personnage du roman, celui qui incarne l’avenir (évidemment tourmenté) du Liban. Ismail est le dernier enfant d’Intissâr. On le suit, du berceau aux champs de bataille. Car la guerre est ici, comme dans bien des pays du monde, la plus facile des tentations. Enflammé par les prêches d’un jeune cheikh « fraîchement rentré du Pakistan », Ismaïl va tout quitter et se lancer, chair à canon follement consentante, dans la moderne croisade « contre les ennemis de Dieu et de l’islam », qui l’entraînera de la Syrie jusqu’en Irak. La métamorphose d’un jeune gars ordinaire en milicien impitoyable n’est pas un sujet nouveau chez les écrivains libanais. Sur ce thème, La Pierre du rire, splendide roman de Hoda Barakat (1996, Actes Sud), n’a pas, à ce jour, été égalé. Mais Jabbour Douaihy tisse un tout autre motif. Abdel-Karim et Ismail, loin de s’ignorer ou de se hair, vont se rejoindre et s’entraider, renouant les fils invisibles d’une improbable fraternité. Le Quartier américain, d’une écriture élégante et concise, use avec maestria du flash-back : il fait du temps, passé, passant, la clé de voûte de ce vif et beau roman.