They often talk about their books in France, whether written in French or translated from the Arabic. Some have studied in France or lived here during their years of exile in the time of war (1975-1990). But their moorings are in Beirut, or in any case not far from the city on this side of the Mediterranean and its magical light. Beirut is the place of childhood memories or years of youth, long-term stays or torn holidays, adult disappointments, joys too. There they are caught by the comical, they draw on his energy. They know the tumult and heartbreak. Beirut showed them what the surge of violence means.
Let’s confess, that to ride alongside Jabbour Douaihy, Sharif Majdalani Hyam Yared, Alexandre Najjar or Diane Mazloum, we have not walked the streets of the capital, the sometimes absent or too crowded sidewalks. We sat in the shade of the cafes or indoors, in the scents of lemonade and coffee grounds to contemplate the city and hear the rhythm of the words phoenix five novelists (…)
It is in Lina’s café in the town center in the heart of the reconstruction of streets that divides both Lebanese – luxury or ghostly rebirth? – That Jabbour Douaihy gave us an appointment. He enjoys writing – it is the only of the five Lebanese novelists do in Arabic – in modern cafes, where anonymous signs “are alike, and where the furniture is identical. In traditional cafés, people come to talk, smoke, play backgammon. The only intellectual activity allowed is to read the newspaper”. ” A guy like me would stray”. We laugh a lot with this novelist corrosive humor. Yet, he wrote on a serious subject: that time that has been and will never be. He beautifully portrays atmospheres.
Jabbour is attached to the mountain where he was born (in 1949) in northern Lebanon, but Beirut has always fascinated him. He lived there in the years 1960-1970. His arrival in the capital city inspired his character, Nizam, before he was drawn into the war despite himself, in “Chased away” (Actes Sud, 2013). Not far from us, Martyrs Square, or “El Bourj” was then “the front door of Beirut”; uninterrupted tumult, card players and cinemas, the Gold Souk, hookah cafes and prostitutes’ homes. “Everything is gone. The war has reduced the city to a dismissal, to a non-event. “Jabbour Douaihy stresses, however, the nearby presence of the El-Bourj bookstore and the daily An-Nahar that “intellectualize just the place”. He did not want to talk about current events. The American Neighborhood, which will be published in September by Actes Sud, nevertheless evokes a subject that is at the heart of these events: the rise of radical Islam and the decadence of the old elites in the city of Tripoli he knows so well – he teaches French literature at the Lebanese University. “There is one thing I have not managed to understand: how can we convince someone to commit suicide? ”
Original French text below.
ls vont souvent parler de leurs livres en France, ils les y publient même, qu’ils soient rédigés en français ou traduits de l’arabe. Certains y ont étudié ou vécu pendant leurs années d’exil, du temps de la guerre (1975-1990). Mais leurs amarres sont à Beyrouth, ou en tout cas non loin de la ville, de ce côté-là de la Méditerranée et de sa lumière magique. Beyrouth est l’écrin des souvenirs d’enfance ou des années de jeunesse, des séjours au long cours ou des vacances arrachées, des désillusions adultes, des joies aussi. Ils s’y font surprendre par le cocasse, ils puisent dans son énergie. Ils en connaissent le tumulte et les déchirements. Beyrouth leur a montré ce que le déferlement de la violence veut dire.
Confessons-le : pour cette balade beyrouthine aux côtés de Jabbour Douaihy, Charif Majdalani, Hyam Yared, Alexandre Najjar ou encore Diane Mazloum, nous n’avons pas arpenté les rues de la capitale, aux trottoirs parfois absents ou trop encombrés. Nous nous sommes assis dans l’ombre des terrasses de café ou en salle, dans les senteurs de limonade et de marc de café, pour contempler et entendre la ville-phénix au rythme des mots des cinq romanciers (…)
C’est dans un café Lina’s du centre-ville, au cœur des ruelles de la reconstruction qui divise tant les Libanais – luxe fantomatique ou renaissance ? –, que Jabbour Douaihy nous a donné rendez-vous. Il aime écrire – il est le seul de ces cinq romanciers libanais à le faire en arabe – dans les cafés modernes, ces enseignes anonymes « qui se ressemblent, et où le mobilier est identique. Dans les cafés traditionnels, on vient pour parler, fumer, jouer au trictrac. La seule activité intellectuelle autorisée est de lire le journal. » « Un type comme moi ferait parasite ». On rit beaucoup avec ce romancier à l’humour corrosif. Il écrit pourtant sur un sujet grave : celui du temps qui a été et ne reviendra plus. Il campe admirablement les ambiances.
Il est attaché à la montagne du nord du Liban, où il est né (en 1949) ; mais Beyrouth l’a toujours fasciné, il y a vécu dans les années 1960-1970. Son arrivée dans la capitale a inspiré celle de son personnage, Nizam, avant qu’il ne soit malgré lui entraîné dans la guerre, dans Saint Georges regardait ailleurs (Actes Sud, 2013). Non loin de nous, la place des Martyrs, ou « El Bourj », était alors « la porte d’entrée de Beyrouth » ; le tumulte ininterrompu, les joueurs de cartes et les cinémas, le souk de l’or, les cafés au narguilé et les maisons de prostituées. « Tout est parti. La guerre a réduit la ville à un non-lieu, à une non-rencontre. » Jabbour Douaihy souligne toutefois la présence voisine de la librairie El-Bourj et du quotidien An-Nahar, qui « intellectualisent un peu l’endroit ». Il n’a pas beaucoup envie de parler de l’actualité. Le Quartier américain, qui paraîtra en septembre chez Actes Sud, évoque pourtant un sujet qui ne la quitte plus : la montée de l’islamisme radical et la décadence des vieilles élites dans la ville de Tripoli qu’il connaît si bien – il y enseigne la littérature française à l’Université libanaise. « Il y a une chose que je n’ai pas réussi à comprendre : comment peut-on convaincre quelqu’un de se suicider ? »
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